La démocratie dans toutes ses manifestations historiques et institutionnelles est exposée au danger du populisme, si l’on utilise ce terme pour caractériser toutes les attitudes politiques liées à l’expansion de l’influence électorale à tout prix et, surtout, à l’évitement des positions impopulaires et des décisions impopulaires.
C’était vrai dans l’Antiquité, c’est vrai dans la démocratie moderne : la démocratie libérale représentative. Bien sûr, cela s’applique également aux États non démocratiques, autoritaires, voire totalitaires, à condition qu’ils soient intéressés par leur légitimité politique. Mais le populisme est le moins pathogène de ces systèmes de gouvernement. Le populisme est donc important en tant qu’élément inhérent de la démocratie.
La démagogie, la simplification, la falsification de données réelles, les promesses légères et exagérées et bien d’autres décisions qui dépassent les limites budgétaires, la flatterie envers le public social et politique, la stimulation des réflexes nationalistes et bien plus encore la subordination de la politique étrangère à ceux-ci sont quelques-unes des phénomènes qui conduisent à appartenir au spectre du populisme et sont catalyseurs du fonctionnement et de la résilience de la démocratie.
C’est un phénomène horizontal, utilisant toutes les valeurs et tous les véhicules idéologiques disponibles, imprégnant la typologie des partis et toutes les formes individuelles de gouvernance démocratique. En fait, la question n’est pas l’absence de manifestations populistes, mais leur délimitation et l’existence de niches anti-populistes qui résistent en assumant des coûts politiques asymétriques, surtout en temps de crise, d Toute position et choix politique prend du poids. Donc, si un État émerge où l’ensemble du spectre politique est populiste d’une manière ou d’une autre et qu’il n’y a pas de sujet politique prêt à supporter les coûts politiques en prenant des positions et des décisions impopulaires dans l’intérêt commun, nous avons devant nous le dilemme fondamental de la démocratie, constamment oscillant entre l’instant et l’histoire.
Le populisme se nourrit du fait qu’institutionnellement la démocratie fonctionne avec des critères contemporains du fait de la périodicité des élections, même si elle est finalement et rétrospectivement jugée avec des critères historiques. C’est la contradiction génétique de la démocratie.
La première matrice du populisme est au service de l’objectif politique principal, à savoir la conquête et l’exercice le plus long possible du pouvoir. La deuxième matrice est la simultanéité des processus démocratiques. La troisième matrice est la facilité avec laquelle le discours politique est dominé par des invocations de conviction débridée sur la responsabilité historique, nationale et institutionnelle. Le « patriotisme de parti » exprime trop souvent l’éthique de la conviction et la logique de l’occasion, contrairement au patriotisme littéral qui exprime l’éthique de la responsabilité et la logique de l’histoire.
Le conflit interne de la démocratie est évident aujourd’hui dans de nombreuses démocraties libérales occidentales (quel que soit le système particulier de gouvernement, qui peut être parlementaire, présidentiel ou semi-présidentiel). Les démocraties craignent leur électorat et donc le résultat probable d’élections ou de référendums. Dans cette période on voit la difficulté de la France à gérer le résultat des dernières élections législatives. On y voit le souci italien de rester dans le gouvernement de M. Draghi alors que les élections aboutiront à une majorité parlementaire dissidente selon les sondages d’opinion. Mais la principale préoccupation pour la pérennité de l’Occident en tant qu’entité stratégique concerne la possibilité d’un renversement lors de la prochaine élection présidentielle américaine.
Dans les presque cinquante ans de la période post-politique, la République hellénique a coexisté avec le populisme dans diverses versions. La courbe du populisme post-politique est l’interprétation sommaire des faiblesses structurelles de l’État, de l’économie, du système politique et de la société civile. La symbiose de la démocratie et du populisme n’a été réellement mise à l’épreuve que pendant dix de ces quarante-huit années, lors de la crise économique de 2009-2019. Ensuite, la nécessité d’une conscience fiscale, et donc d’une conscience démocratique, est apparue comme un problème national fondamental. C’est impressionnant la rapidité avec laquelle tout le monde, politiques et société civile, qui n’ont certainement pas le même degré de responsabilité, a voulu revenir immédiatement à la « normalité ». J’espère et je prie pour que l’histoire n’enregistre pas un autre manque de conscience.
M. Evangelos Venizelos est un ancien vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, ancien ministre de la Défense nationale. Son nouveau livre « Versions de guerre 2009-2022.
Une conversation avec Giorgos Kouvaras sur le contexte de la crise économique et ses conséquences ».
La première présentation aura lieu le mardi 26 juillet. à 19h30 dans le jardin du Musée byzantin d’Athènes.
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